mercredi 24 septembre 2008

Fausses et triviales impressions d'Italie et de Venise.


5 heures de route entre Turin et Venise ça vous laisse du temps pour réfléchir, divaguer,vous faire une opinion, fausse assurément, sur l'automobiliste Italien, et vous faire suer tellement c'est long.
Sur la troisième voie les grosses cylindrées sont reines. Ce ne sont pas les Ferrari ou les Maserati made in Italia mais le Cayenne et autres Q7 made in Deutchland, accompagnées sur l’asphalte par nombre de S4, S6 et S8.
Ces bagnoles me rendent connement jaloux et je sais pourquoi ;-). Visiblment un monde sans voiture c'est pas pour demain.
Cette fameuse voie, peu fréquentée par les pneus de notre 307, est interdite aux camions. Elle est surtout une invitation à la vitesse. En clair vous devez rouler à plus de 110... et à moins de 130...impossible avec ce type de véhicule, le leur pas le mien, impossible pour un tempérament qui se fout d'une ligne blanche et double quand ça lui chante. Ils ne sont pas tous comme çà mais ils sont nombreux quand même. L'absence de radar, malgré les panneaux qui tentent de nous persuader de leur existence, n'est sans doute pas étrangère à une vitesse de croisière qui dépasse les 150 sans sourciller.
L'ATV, l'équivalent de notre TGV, est parallèle à l’autoroute. En phase terminale entre les deux pôles économique de la botte, les travaux ont commencés il y a 4 ans. On rêve d'une liaison Paris-Milan à grande vitesse, trop simple sûrement pour être réalisée.
Les français se targuent d'être cartésiens, c'est à dire de douter, bien que Descartes ne doutait pas de l'existence de Dieu. Cette approche nous conduit vers les sommets de l'intelligence, inaccessible à nos voisins. A voir :-)
Exemple : les stations services automatiques. Outre le fait qu'elles refusent les cartes de crédit, leur emploi est trop simple pour nous. Nous sommes décontenancés. Il suffit d'insérer un billet de 5 ou 20 euros dans l'avaleur, le AAB, de choisir le numéro de pompe devant laquelle nous sommes arrêter et de nous servir. Pas besoin de précisez son type de carburant. C'était trop simple je ne pensais pas que celà puisse fonctionner. J'ai espionner avant d'oser insérer le premier billet. Le décrochement de la pompe idoine suffit pour voir le crédit s'afficher et s'épuiser au fur et à mesure que le précieux liquide remplit notre réservoir. A 1,40 € (le 15/09) le sans plomb 95 c'est 5 à 8 cent moins cher que chez nous, dans les hautes Alpes en tous cas.
Sur l’autoroute, mais c’est vrai aussi dans les cafés, j’ai toujours été un peu surpris de devoir payer mon café, un dé à coudre de café devrais-je écrire, mon sandwich avant de pouvoir être servi.
Le petit noir grand révélateur de nos us et coutumes, c'est la seule chose que j'ai retenue de Bagdad Café.
What else ? Je suis arrivé, enfin, à Venise quand George et Brad en sont partis.
Je rêve d'y aborder en voilier, comme James Bond dans Casino Royal. En réalité je suis au camping de Cavallino, une station balnéaire "allemande" et mon navire est le vaporetto qui assure la liaison entre Punta Sabioni et la place St Marc, mon PC est un mac et non un Sony .... c'est déjà ça.
Venise n'est plus ce qu'elle était. La fiancée de la mer n'est plus qu'un piège à touristes. Superbe piège certes mais sans âme, sans dynamisme, sans vie.
La plus belle ville du monde est un amas de pierre au charme fou, mais les vénitiens ne sont plus les conquérants de l'Orient. Ils sont sur le pas de leur(s) boutique(s), aux guichets des musées et des billetteries des vaporetti. Ils pilotent des bateaux cantonnés à la Lagune et les pêcheurs du port de Cavallino partent aux aurores sur l'Adriatique pour être rentrés en milieu d'après-midi. Le Bucentaure bat pavillon neo-zélandais.
Les rues grouillent de passants qui se font prendre en photo devant un "banc" de poissons sur un lit de glace, décoration d'une trattoria intra muros, de passants qui achètent sulfures et autres babioles de Murano, de passants qui passent devant les boutiques de Cartier, Hermès et Louis Vuitton. Des marques italiennes pour sûr.
Le nouvel héraut de Venise est Hugo Pratt, le père de Corto Maltese, il succède à Shakespeare et tous les auteurs qui trouvèrent là inspiration et énergie créatrice. J'étais convaincu de pouvoir discerner les caractères runiques gravés sur le lion qui surveille l'entrée de l'Arsenal. C'est impossible, Hugo m'a leurré. Bien joué.
Je me suis vengé. J'ai acheté Les pierres de Venise de Ruskin, j'espère y trouver des textes pour un guide de la Venise de St Marc. Pour la Venise byzantine, c'est autrement plus dur. La traductrice à juger bon de ne pas traduire le chapitre s'y référant.
Comment comprendre la Sérénissime sans Byzance ? Impossible.
Il faut avant de fouler les pavés de la place et le pavement de la basilique qui portent le nom de l'Evangéliste se rendre à Torcello, et se recueillir devant les mosaïques de la cathédrale Santi Maria Assunta E Donato. Un plan basilicale qui nous transporte aux premiers temps chrétiens, ou presque, nous sommes à Ravenne , à Constantinople ou presque.
Dehors sous nos pieds on sent la terre, le socle sur lequel la cité des Doges est bâtie, l'eau affleure, elle nous encercle avant de nous engloutir. C'était un pari insensé, ils l'ont gagné.
Byzance et St Marc sont indissociables pour l'Oeuvre, l'opera, vénitienne (je ne parle pas de la Fenice).
L'argent et le sang aussi. L'argent du commerce, des épices et des esclaves. Le sang des mercenaires, suisses ou allemands, et des pauvres bougres pour qui la mort est une issue plus supportable que la vie, le sang des vaincus, ceux de la terre ferme, ceux de Crète et de Grèce. C'est le prix de la beauté, nous n'y pensons plus, nous n'en parlons plus, nous refoulons cette laideur. Le pont des soupirs ne porte plus le râle des prisonniers étouffé par le brouhaha des touristes. Les Tétrarques sont à jamais muets de stupeur devant le sac de Sainte Sophie et des Blachernes par les latins de France et de Venise, éblouis par les flashs des appareils numériques.
Les "altana", ces balcons construits en haut des maisons pour prendre le soleil, me font penser aux milliers de courtisanes, prostituées, qui voulaient là oublier les souffrances du mal français, pour obtenir un blond vénitien, à quel prix, aujourd'hui disparu. Pour une qui le valait bien , combien de centaines d'autres ne valaient rien ?
Sur le quai des Schiavoni, lieu de débarquement des esclaves, les palaces rivalisent avec les yachts et les vendeurs à la sauvette, représentants de la nouvelle misère du monde, il y a des lieus où rien ne change. Donna Leon, dans le Monde de la musique, avoue que son dernier roman, De sang et d’ébène, lui fut inspiré par ses pauvres êtres.
Sous les arcades de la piazzetta, le café Florian, vieille dame encore coquette mais démodée. Sous les arcades, le luxe, les créations contemporaines de Murano superbes mais inaccessibles. Sous les arcades, l'or des bijoux féminins ont pour pendant les montres made in Switzerland qui ornent les poignets des présidents et des stars. Pas de trace d’une Panerai , dommage j'aurai aimé en voir une autrement qu'en photo.
Le musée Correr est à 13 €, cher, il recèle des trésors, le musée des Icônes aussi. Le premier est un peu fréquenté, le second pas du tout. Pourtant il est climatisé et ne coûte que 4 €, je ne comprends pas :-)
Les Scuole sont aussi riches en trésors que les églises. J'avais visité celle de San Rocco et du Tintoret il y a deux ans, superbe, et mettais cassé le nez sur celle de San Giorgio. Ouverte cette année je m'y suis précipité. Ce n'est plus une scuola, mais un musée, ce n'est plus un lieu de vie mais un cimetière pour les œuvres de Vittore Carpaccio.
Il existe encore peut être des minutes relatant ses réunions de Dalmates discourant sur la vie des affaires et celle du territoire natal abandonné pour tenter de vivre mieux ici, en compagnie des grecs, des allemands, des florentins sous la menace du Turc. Qui un jour s'y intéressera ?
A droite en rentrant St Augustin est représenté dans son cabinet de travail. En bas du tableau une partition, une vraie musique me dit la gardienne des lieux. Super, existe-t-il un CD, quelqu'un s'est-il penché sur l'histoire de cette partition ? Elle ne sait pas.
Merde le cloisonnement sévit aussi ici. Si Carpaccio à pris la peine de, comme Dante, donnons nous aussi la peine de. J'essaierai.
J'aime Vivaldi, je ne connais pas Goldoni, mais avant eux on écoutait de la musique non? Giorgione était paraît-il un excellent joueur de lyre à bras. Pourquoi réduire la musique vénitienne à ces deux compositeurs ?
On doit à Hegel le classement des arts. Les cinq premiers comptent en leurs rangs l'architecture. La biennale de cette dernière était ouverte aux professionnels. A l'heure du déjeuner, aux terrasses des trattorias sur la place de l'Arsenal, le staff des cabinets. Ils ne sont pas habillés comme nous les architectes, nous les touristes je veux dire. Le patron fume le cigare, l'assistante sort son micro et sa clé USB pour se connecter au Net, les affaires courent toujours, les autres membres écoutent religieusement l'analyse du boss entre deux bouffées de havane. Ils rêvent tous d'être le prochain lauréat, la prochaine vedette de cette messe. Cette année c'était Frank Gehry, l'homme du musée Guggenheim de Bilbao et de la fondation Arnault du bois de Boulogne. Seulement personne ou presque n'habite dans un musée, et quand sur l'autoroute je rentrerais vers Paris , les premiers édifices que je verrais seront des tours HLM qui vont me foutrent le bourdon, c'est pareil à Milan, c'est pire à Gêne la ville de Piano.
L'architecture un art majeur ? Exceptionnellement !

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